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Articles sur Montherlant (hors presse)

76. Jules Roy (1907-2000) et Henry de Montherlant (1895-1972)

“La hargne du mâle contre le mâle qui a beaucoup joui ;
contre Casanova traité de sot, contre Byron traité de mufle,
contre d’Annunzio traité de fumiste, contre Restif traité de hâbleur.”
(Montherlant, Carnets n°32, 1936-1937, Gallimard 1957)

“Quelle chose passionnante que le spectacle de cet homme qui se cherche parmi tant de tempêtes,
d’idéals détruits, de mondes intérieurs bouleversés.”
(Jules Roy, Journal octobre 1935)

 “L’Equinoxe de septembre de Montherlant.
Pas étonnant que les journaux bien-pensants se soient voilé
la face devant cette machine-à-botter-les-fesses à la bourgeoisie
aux mains molles, aux rombières déliquescentes,
aux amis-de-Sainte-Thérèse-de-Lisieux,
aux chefs de peuples, aux chefs de guerre  !
Je hennis d’enthousiasme
.”
(Jules Roy, Journal décembre 1938).

 

 
 

Jules Roy
officier aviateur.

Nous présentons ici un choix d’extraits des Journaux de Jules Roy où Montherlant est cité. Ces extraits sont nombreux. Si Jules Roy dans ses débuts semble fasciné par Montherlant, petit à petit cette admiration sera plus contrastée, avec des réticences et des retours. Jules Roy est un impulsif, un réactif, un “macho”. Il passe souvent du noir au blanc pour revenir au blanc. Peu de nuances chez lui dans ses notes sur Montherlant qu‘il ne craint pas d’égratigner ou d’attaquer parfois avec violence en lançant des affirmations acerbes, sans preuves, basées sur des témoignages peu fiables, puis il revient vers lui, l’assure de son admiration et le sollicite pour obtenir son vote à l’Académie française…

Montherlant qui, au début l’avait introduit dans le milieu des éditions et des revues littéraires, l’avait aidé et lui exprimait une sincère et enthousiaste sympathie, finit par l’éloigner de lui surtout après 1945. Ce que Jules Roy n’apprécia guère.

Jules Roy est né en 1907 en Algérie et est mort à Vézelay (France) en 2000.

Il fut séminariste, passera ensuite à l’école d’élèves-officiers d’infanterie parce qu’il avait lu, de Montherlant, le Chant funèbre pour les morts de Verdun. En juin 1953, il rompt avec l'armée avec le grade de colonel ; il juge qu'elle se déshonore dans la guerre d’Indochine dont il désapprouve les méthodes.

Il se tourne alors pleinement vers la littérature. Il sera candidat deux fois à l’Académie française mais ne sera pas élu.
Il fut un admirateur de Camus. 


1. Journal 1 : 1925-1965 ou Les années déchirement 

22 décembre 1932 : Emouvante lecture du Chant funèbre de Montherlant. A poursuivre. Etais-je aveuglé par mes idées religieuses outrancières pour rejeter à priori Montherlant  ! Quelle richesse possède cet homme. Avec Bernanos, il a, aujourd’hui, quelque chose à dire. Combien sont-ils  ?

2 janvier 1933 : Ce Chant funèbre, quelle juste apologie de la guerre  ! Une foule d’idées que je ne songeais pas à évoquer ; toute une noblesse, une grandeur de l’homme que j’ai failli écarter. Que de substance chez ce Montherlant  ! Connaître la guerre. Je ne l’ai pas connue. Connaître la paix. Je la connais un peu. Est-ce beau  ? J’avais oublié ces questions. L’écrivain a posé là, en maître, l’un des plus terribles, peut-être le plus terrible, peut-être le seul problème au monde : la Guerre et la Paix, la Mort et la Vie, Mors et Vita. Il le soulève sur ses épaules comme un gigantesque athlète. Admiration devant cette prose magnifique, drue, si foisonnante d’idées, si pleine de tendresse.

8 janvier 1933 : Paganisme froid, sûr de lui, de Montherlant. Celui des Fontaines pouvait paraître suspect, né des folies des désirs de la chair, mais celui-là, né de la contemplation de la mort. Quel bon élève des Pères que ce Montherlant  ! Et le père Sanson ose le citer, en chaire, aux belles dévotes  ! Jeu dangereux, mon révérend  ! Supposez que ces chères âmes aillent aux sources et lisent une phrase comme celle-ci : “La vie est une munificence du néant, et imméritée. Impie qui oublierait ou refuserait de jouir d’elle. “Hé, hé, vos belles dévotes vont devenir songeuses…” 

 

Jules Roy
écrivain.

 

28 mai 1933 : Rendez-vous avec Henry de Montherlant, au café de Versailles à Montparnasse. Je le reconnais mais je l’avais vu brun, il est châtain.

30 novembre 1933 : Montherlant m’envoie une longue lettre pour me demander un article sur lui, destiné à 1933. Geste de grand seigneur, car combien d’autres se seraient tirés  ! Il veut me remercier de ce que j’ai fait pour lui. “Et puis cela vous ouvrira les portes, pour d’autres articles, de cette importante publication, ou de La Revue universelle que Massis dirige également…” Il m’envoie en même temps les épreuves de sa conférence à l’Ecole de guerre.

10 décembre 1933 : Déjeuner avec Montherlant. Il me paraît un peu vieilli, assagi, mais si sympathique, indépendant, pur d’esprit. Me parle de quelques mœurs de gensdelettres. Quelle joie de connaître qu’il n’en est pas un  ! Un moment, il se lève pour aller saluer un parent. Je le vois revenir ; il me semble un peu grêle, sec, les yeux, le visage, sous lequel brûle un feu qui le consume.

22 décembre 1933 : Comme j’avais parlé à Montherlant de pages sur Verdun qu’on m’avait refusées partout, il m’avait dit : “Envoyez-les-moi si vous voulez.” Dimanche, il m’écrit : “J’ai lu vos belles pages, belles par le sentiment mais non moins par l’expression. Vous avez d’admirables images et aussi une façon de passer sur ce qui ne peut être dit. Votre citation finale s’imbrique à merveille dans le texte. Comment m’avait-elle échappé quand j’écrivais Le Chant funèbre  ? Je vous remercie profondément d’avoir pensé à mettre mon nom au haut de ces pages. Je vois le 30 Mme de Fels, je les lui proposerai pour La Revue de Paris”. Toujours l’homme généreux.

26 décembre 1933 : Montherlant me disait : “On peut écrire ce qu’on veut dans les revues. Bien sûr, une fois qu’on est agréé. Les directeurs ne lisent pas. Je veux dire qu’ils ne savent pas lire et que tout peut passer, à condition que le style reste normal, académique. Un mot peut arrêter, non une phrase ou une idée. Les idées, ils ne les comprennent pas. Mais le mot dur, non noble, inacadémique, ah  ! non. Doumic m’a fait changer le titre de ma conférence à l’Ecole de guerre : j’y avais mis le mot “morts”. Il m’a dit : “Cela fait mal sur un sommaire. Mettez : la vertu de prudence”. Naturellement, l’inconnu a toutes les peines du monde à se faire publier. Ce qu’il écrit peut avoir toutes les qualités, être infiniment supérieur à tout ce qui est inséré, n’importe. Inconnu, il ne passera pas. C’est la règle.”

22 février 1934  : Réponse très cordiale de Jean de Fabrègues, rédacteur en chef de La Revue du siècle, à qui j’avais proposé la contrepartie d’un article sur Montherlant.

9 mars 1934 : Montherlant m’écrit que mon article sur lui est accepté par 1934 et paraîtra dans quelques semaines. Jean de Fabrègues, que j’ai vu il y a deux jours, a beaucoup insisté pour que j’envoie des articles “violents” sur ce que je voudrai. Ma réplique “Paganisme du Chant funèbre” qui contient des coups de patte assez durs, paraîtra sans une retouche dans La Revue du siècle. Je suis moi-même étonné.

7 mai 1934 : Montherlant m’écrit que ma critique de son livre Encore un instant de bonheur est la meilleure que j’aie faite et que c’est une critique de poète.

10 décembre 1934  : Deux lettres de Montherlant. Quelle récompense  ! Il se dit tellement enthousiasmé de mon essai sur lui qu’il me demande de l’autoriser à le publier à La Nouvelle Revue critique, dans la collection des Célébrités contemporaines. Je bondirais de joie si je n’avais peur d’aller au-devant d’une nouvelle déception. Ne pas me lancer. Freiner tout de suite.

19 décembre 1934 : Nouvelle lettre de Montherlant. Plus intime et confiante.

21 avril 1935 : Livres que j’emporterais si j’allais à la guerre : la Bible, Mors et Vita de Montherlant, un recueil de poèmes, mais lesquels  ? Quelle curieuse enquête à faire sur les livres qui seraient dans les cantines en temps de guerre.

18 août 1935 : Lettre de Montherlant où il voudrait que j’abandonne mon projet d’étude sur lui (car mon éloignement l’effraie et surtout mon état d’homme non pressé) au profit d’un universitaire de qui le papier est déjà pondu. Je lui réponds, de quelle encre  ! presque insolemment, lui disant que de nous deux, Alban [1] n’est pas celui qui écrivait Le Songe  ! Nouvelle longue lettre enrobée d’éloges, n’acceptant l’universitaire que comme un pis-aller, parce que La Nouvelle revue critique va sombrer, et que je suis loin de lui, m’offrant de donner mon texte Guerre et Amour à La Revue hebdomadaire prochainement. Je n’insiste plus et lui dis que j’abandonne mon travail sur lui. Alban, Alban, tu es mort, après la guerre, dans quelque bouge d’Espagne où tu avais été poursuivre un beau visage rencontré. Car cet “académicien” ne porte pas ton nom. 

 
 

Jules Roy
écrivain.

17 octobre 1935 : Je reçois le nouveau livre de Montherlant, Service inutile. L’avant-propos et un document sur sa vie. Ces confessions vont une fois de plus paraître insupportables et puantes d’orgueil. Quelle chose passionnante que le spectacle de cet homme qui se cherche parmi tant de tempêtes, d’idéals détruits, de mondes intérieurs bouleversés. Il conte brièvement la tournure bizarre de sa vie et répond par une chose plus étonnante encore à tous les étonnements de la tourbe littéraire. Aussi devant cet engendreur de livres, découragement. Rien en perspective pour moi que cette vie grignotée et vécue dans l’inutilité. Sentiment de non-valeur.

25 octobre 1935 : Montherlant m’écrit : “J’ai signé un manifeste dit de gauche au sujet de l’affaire italo-éthiopienne. Ordre a déjà été donné que mon nom ne fut plus imprimé dans Le Jour. D’autres organes de droite n’entreront-ils pas dans ce système de sanctions  ?” C’est trop sale, trop bas et trop bête pour n’être pas vrai. Je ne m’étonnerais pas que Jean Tenant refuse alors mes notes sur Montherlant.

28 octobre 1935 : Montherlant me télégraphie pour me demander si je l’autorise à proposer aux Cahiers du Sud une petite étude que je viens de lui envoyer. Un essai de synthèse écrit après la lecture de Service inutile, situant le livre et divisant son œuvre en deux parties : l’œuvre du cœur et l’œuvre de raison. Naturellement, j’accepte. Sans espoir, d’ailleurs, connaissant la valeur des promesses des directeurs de revues…Satisfaction que j’aurais, ces notes paraissant aux Cahiers du Sud, à ne pas les proposer à Tenant, ami plus douteux que je croyais, et gâté par ses intransigeances.

31 octobre 1935 : Lettre de Montherlant. “Votre étude m’a fait un grand plaisir, et d’autant plus qu’aucun de mes livres n’a été accueilli avec autant d’animosité et de silence que Service inutile. Ils ont senti le fouet ; je trouve humain qu’ils montrent les dents… Je crois que votre essai est celui qui m’a été le plus au cœur de ceux qu’on a consacrés à ce livre. Je l’ai remis à Marcel Brion qui verra le directeur des Cahiers du Sud dans quelques jours et j’écris d’autre part à celui-ci. Je reste à Paris jusqu’au 20 décembre. Si jamais vous y passiez quelques jours je serais bien content de vous rencontrer. Je serais injuste si je ne reconnaissais pas que Service m’a valu beaucoup de lettres émouvantes. Mais de gens de la foule. Le livre passe (en partie) par-dessus le barrage fait contre lui. Mais imaginez qu’il soit le livre d’un débutant : il était étouffé, tué, comme on tue un enfant au sortir du ventre de sa mère…”

17 mars 1936 : Les Cahiers du Sud publient mes notes sur l’œuvre de Montherlant. Moi qui, autrefois, demandais des quantités d’exemplaires aux revues ou journaux pour les adresser à des tas de gens, n’envoie désormais plus rien et ne sais que faire des numéros qu’on m’expédie.

10 avril 1936 :

Cher Jules Roy.

Je n’ai su la publication de votre étude que la veille du jour où j’ai reçu votre lettre, par une lettre de Guibert. Il y a peu de temps que je suis revenu d’Afrique et tous les “imprimés” arrivés pendant mon absence étaient restés en vrac, non dépaquetés. Je vous redirai combien ces “Notes” m’ont fait plaisir – combien vous avez raison de penser que Aux Fontaines “mène” à mon œuvre, que je me mets en entier dans ce que j’écris, combien votre rapprochement avec Saint Augustin – toutes proportions gardées – me va au cœur. Merci encore. J’ai beaucoup d’échos flatteurs sur cet essai.
Que vous dire de la situation que vous sentiez aussi bien que moi. On pourrait retourner une de vos phrases et dire que le problème du bonheur, du travail, etc. prend ses teintes en face de celui de la mort, suspendu sur nos têtes. Le caractère inéluctable de la tragédie de l’avenir n’est guère une nouveauté pour moi. Depuis six ans je vis, comme si je n’avais que quelques mois de vie devant moi…Mais enfin, moi, je dois bien reconnaître que j’ai pas mal d’acquis en fait de bonheur, de liberté d’esprit, de vie telle que je la souhaite. Comment font les autres  ? Inconscience. Oui, mais les autres encore, ceux qui savent, et ne cessent de savoir.
En juin vous recevrez Les Jeunes Filles. Mais c’est un roman écrit en 1930, qui n’a rien à voir avec le problème de l’heure.
Le projet de La Revue hebdomadaire est dans l’eau, la presse de droite me bat froid depuis que j’ai signé pour l’Ethiopie. On dit aussi que cette publication va cesser de paraître.
Si vous passez par Paris, faites-moi signe. Merci encore. Bon courage dans votre Service inutile. Que vous dire ? Oui, vraiment, mon expérience ne vaut que pour moi, et je suis tristement embarrassé quand je voudrais dire à quelqu’un pour qui j’ai de la sympathie quelque chose qui renforce ses raisons de vivre.
Montherlant, 8 avril 1936

 

Maison de Vézelay où Jules Roy
vécut ses vingt dernières années
jusqu’à sa mort.

 

10 juillet 1936 : Visite d’Armand Guibert, au Larzac. Nous discutons à perte de vue sur la non-conformité de l’homme et de l’artiste. Pour moi, l’homme doit tendre à réaliser l’artiste, l’artiste à idéaliser l’homme.
Qu’est Montherlant, ce pédéraste qui joue à être l’ami des femmes et transpose en sensations normales des plaisirs particuliers  ? Qu’est ce champion du catholicisme, de la liberté, de la noblesse qui n’est qu’un cabotin sans pitié et sans grandeur  ?

(NDLR : Que s’est-il passé entre eux pour mériter une attaque aussi virulente  ?)

28 octobre 1936 : Curieux article de Montherlant, dans Marianne. Il se défend, non sans une pointe d’énervement, contre toutes les femmes plus ou moins bas-bleus qui se sont reconnues dans Andrée Hacquebaut et en ont bâti des légendes dont elles essaient de “profiter”…Cette page n’est pas la moins curieuse des Jeunes Filles.

5 décembre 1936, Alger : Lourd ennui de cette traversée, dégoût profond du navire. Je constate que rien en moi n’appartient à la mer. Près d’arriver, je suis réveillé au petit matin, encore dans la nuit. Je m’habille, vais sur le pont désert : les lumières d’Alger scintillent au bout de la mer, comme une constellation miraculeuse étendue sur les flots. Et l’émotion me bouleverse devant cette terre qui sort lentement des ténèbres, pour tout ce qu’elle est pour moi. “Il y a encore des paradis…” Montherlant a dit vrai.

(NDLR : Jules Roy est né en Algérie)

4 février 1937  : “Tout ce qui ne m’est pas plaisir m’est douleur.” Combien cette phrase de Montherlant, écrite sincèrement ou non, pour la galerie ou répondant à un état réel (avec lui l’on ne sait jamais), et vraie pour moi  ! C’est là que réside le marasme où je me traîne, indifférent aux petites choses, incapable de tenir une conversation sans intérêt, de voir quelqu’un pour qui je n’ai pas de sympathie, crevant littéralement d’ennui dans ces réunions où, d’habitude, les hommes goûtent du plaisir, ennemi des banquets et autres cérémonies. Seul le plaisir me transfigure. Encore faut-il que rien ne le gâte, que la compagnie où je me complais ne comporte aucun être pour qui je nourrisse quelque répulsion naturelle ou raisonnée. Dans toutes ses œuvres, il semble que Montherlant écrit ce que je ressens misérablement au fond de moi-même.

15 février 1937 : Lettre de Guibert qui m’envoie, de Tunis, l’entrefilet d’une revue londonienne The Criterion qui loue mes notes “lumineuses” sur Montherlant et m‘appelle Emile Roy  !

23 février 1937 : La nuit n’est jamais tellement noire…Ces premières heures de stupeur passées après une catastrophe, ressaisis-toi. Il n’est pire malheur qui ne porte un germe d’espoir. C’est à cet espoir que tu dois te rapprocher. Cache tes larmes. Ne montre aux hommes que ta force, dirait Montherlant, mon maître.

15 juillet 1937 : Où aller  ? Chez Gide  ? Chez Montherlant, décide Guibert – rue de Bourgogne - (NDLR : c’est jusqu’en 1940 le domicile parisien de Montherlant) - Au moment où nous sommes à quelques pas du 41, Guibert nous arrête : “Le voilà  !”.
En effet, c’est lui, tête nue, vêtu de gris, qui rentre chez lui. “Sautons sur lui”, dit Guibert.
Il court, nous appelle à grands gestes. Amrouche et moi traînons la patte derrière lui. Course dans les escaliers. Amrouche et moi montons lentement. Guibert rejoint Montherlant sur le seuil de sa porte. Etonnements, salutations. Montherlant tourne aussitôt le dos. “Allons prendre quelque chose en bas.”
Mais il n’y a là que des caboulots, d’aspect triste. Montherlant nous quitte un instant pour entrer dans une pharmacie où il va chercher de l’aspirine, puis nous prenons l’avenue de Grenelle, débouchons sur l’esplanade des Invalides devant la foire de l’Exposition. Il est dix-neuf heures trente. Montherlant nous demande où nous allons dîner, nous propose de dîner ensemble. “Mais, dit-il, je ne pourrai rester longtemps avec vous. Je dois rentrer à neuf heures.”
Taxi. Un restaurant où les tables sont dans une sorte de bosquet. Nous attendons qu’il ait usé des lavabos, nous installons, nous levant quand il arrive. Il prendra du melon, du saumon, de la crème au chocolat qu’il avalera très vite. Guibert et Amrouche des truites. Moi des tomates et du gigot. Goût de Montherlant pour les mets sucrés. Déjà je l’avais noté au café de Versailles. Là encore il demande du sauternes, puis se ravise à cause de sa migraine. Guibert et Amrouche proposent un vin du Rhin, qu’il accepte mais n’apprécie pas alors que le vin était exquis, fruité, frais à point.
“Mademoiselle  !…”
C’est lui qui a crié, d’une voix brutale, sèche. Il fait changer la nappe où il a remarqué une tache. Il parle durement à la servante, la tête tournée du côté où elle n’est pas. Guibert mène la conversation, très droit, très digne, très professeur en chaire, le nez en l’air sans broncher :
- Je croyais que vous étiez bien avec Edmond Jaloux  ?
- Nous sommes brouillés. J’en avais assez de lui.”

 
 

Montherlant en 1945.

12 août 1937 : Eté entendre, le 10, au théâtre des Champs-Elysées, Montherlant parle des rapports de la vie et de l’œuvre chez l’écrivain. Conférence payée à l’auteur par l’Exposition, gratuite pour l’auditeur.
Huit femmes pour un mâle. Pas de jeunes hommes. Alban, devenu homme célèbre, est abandonné de ses compagnons. Je savoure cette vengeance.
Voix monotone et sèche, mais il a joué le désintéressé, le loyal, le pur, le poète. A l’entendre, on le croirait. Il a osé dire et répéter qu’il ne s’occupait pas du rayonnement de son œuvre – autrement dit de sa publicité. Ô Guibert, ô Amrouche  !
Mais à la sortie, les tréteaux plient sous les piles de ses bouquins et les ouvreuses glapissent partout : “Monsieur de Montherlant signe lui-même ses œuvres au Foyer”… La phrase est de lui, “lui-même”.
Lettre à lui-même :

Cher Monsieur,

J’assistai, mardi dernier, à votre conférence. Je vous y ai applaudi. J’y ai été ému plus d’une fois aux échos d’Encore un instant de bonheur et de Service inutile, aux accents que vous aviez pour dire l’odeur qui règne dans le cabinet de travail, le déchirement intérieur de l’artiste et chaque fois qu’un oiseau du paradis ou qu’un couple de corbeaux s’échappait de “la royale pourriture de la vie”  !
Que d’enseignement  ! A vrai dire, pas ceux que j’attendais, pas ceux de mes discussions avec Guibert touchant les rapports de l’œuvre et de la vie propre de l’écrivain, mais tellement d’autres. Ne serait-ce que le rayonnement de cette confiance dans la vie qui ne peut naître que de la possession du bonheur.
S’il n’y avait eu tant d’ ”invités” à vous faire signer vos œuvres, je vous aurais apporté Le Démon du bien. Mais je suis tout désorienté au milieu de la foule où j’étais l’un des très rares jeunes hommes. Je n’ai pas osé.
René Louis Doyon m’invite dans ses prochains Livrets du mandarin. Au moins, là, toucherai-je des lettrés. Je parlerai de vous sous le titre : “Messieurs Henry de Montherlant, conférenciers.” C’est Barrès, je crois, qui disait à peu près que la vie de Paris a ceci de bon qu’elle rend moins distants les grands hommes et nous les fait mieux connaître. Vous pardonnerez à l’un des ultimes compagnons spirituels d’Alban de parler avec tant de liberté d’Henry de Montherlant. Croyez, je vous prie, à mon fidèle et respectueux dévouement.
Jules Roy.

16 août 1937. Lettre de lui-même :

Cher Monsieur,

Je suis content que vous ayez été un des quelques mâles de cette “chambrée” si peu faite pour moi. Que m’importe cette volaille  !
Je serai très heureux que vous donniez quelque chose chez René-Louis Doyon. Je ne comprends pas bien votre “Messieurs de M, conférenciers” sinon pour indiquer les différents moi que j’essaie de diriger comme les chevaux d’un quadrige, mais il me semble que c’est plutôt dans mon œuvre qu’ils apparaissent que dans cette conférence.
Je vous ai fait envoyer hier un nouvel exemplaire du Démon (je n’avais plus l’adresse de Versailles) et j’ai joint un “papier” qui aurait pu servir de prière d’insérer.
Bien cordialement vôtre.
Montherlant.

Henry de Montherlant collaborateur à Commune et à Vendredi, vient d’être invité par le gouvernement allemand aux fêtes nazies de Nuremberg en septembre. Quelle pagaille dans cette Europe  !

(NDLR : Jules Roy maintient cette vilenie dans son Journal publié en 1998 en omettant de préciser que Montherlant ne se rendit jamais à une célébration organisée par des nazis en Allemagne, accusation fausse et méchante donc qui montre à quel point Jules Roy est capable d’exprimer rancune, hargne ou jalousie à l’égard de celui qu’il a tant admiré et qui lui montrait une réelle sympathie.)

19 août 1937 : Etonnante figure que celle de Pilastre, me rappelant Montherlant par des côtés de sa vie libre, des traits de son caractère, mais un Montherlant vivant ce que l’autre se borne souvent à écrire.

21 décembre 1937 : Comme Montherlant, je pense à tout ce que je pourrais faire en jouissant de la vie.

12 novembre 1938 : Cérémonie de la flamme à l’Arc de triomphe, hier soir. Tous ces haut-parleurs tonitruants, ces gens à la terrasse des cafés, ces illuminations, ces poules de luxe profitant du décor donnent un air de kermesse grotesque. Petit monde des curieux. On ne sent pas l’élan d’un peuple. Le culte du Soldat inconnu ne remue plus personne. La minute de silence, c’est inutile ou trop peu dans notre pays de discours. Une minute, qu’est-ce  ? Montherlant écrit dans la N.R.F : “Ce n’est pas de minutes de silence dont nous avons besoin, Monsieur Daladier, mais d’avions”. Cette obstination à vouloir quand même faire revivre une religion morte est affligeante.

27 décembre 1938 : L’Equinoxe de septembre de Montherlant. Pas étonnant que les journaux bien-pensants se soient voilé la face devant cette machine-à-botter-les-fesses à la bourgeoisie aux mains molles, aux rombières déliquescentes, aux amis-de-Sainte-Thérèse-de-Lisieux, aux chefs de peuples, aux chefs de guerre  ! Je hennis d’enthousiasme.

 

Montherlant en 1950.

 

21 novembre 1942 : Claude-Maurice Robert, hier dans sa petite maison de poète. Parlé de Montherlant avec qui il a vécu assez longtemps, de l’horrible Jeanne Sandelion qui est l’Andrée Hacquebaut des Jeunes Filles et de qui, quoiqu’il en dise, Montherlant a reproduit des lettres entières.

(NDLR : Montherlant a rencontré en Afrique du nord Claude-Maurice Robert, aventurier sans le sou, un peu poète, un peu entremetteur, mais il n’a jamais vécu avec lui  ! Ceci est une nouvelle méchanceté de Jules Roy. En outre qualifier d’horrible la pauvre Jeanne Sandelion excellente poétesse et amoureuse passionnée de Montherlant n’est guère charitable de la part du chrétien Jules Roy, de même qu’écrire que Montherlant a plagié les lettres de Sandelion pour son livre Les Jeunes Filles. Qu’il s’en soit inspiré, oui peut-être, mais de lettres d’autres amoureuses aussi  ! Jules Roy ne peut donner aucune preuve de ce qu’il avance n’ayant en sa possession aucune des lettres de la longue correspondance Sandelion-Montherlant.
Certains pensent que Montherlant se serait inspiré peut-être de Claude-Maurice Robert pour son personnage de Manoussié dit Colle d’Epate dans Un Assassin est mon maître. Par contre écrire comme certain critique que le récit de Montherlant La Chienne de Colomb-Béchar (Service inutile, Essais, Pléiade page 641) est le portrait de Cl-M Robert est ridicule et méchant.
Dans la maison de Claude-Maurice Robert, Jules Roy inventorie sans retenue une correspondance privée Robert-Montherlant, classe une centaine de lettres, “un trésor documentaire dont Robert n’avait pas grande conscience, où l’auteur des Jeunes Filles se dénude (dixit Jules Roy). ”J’aimerais tout recopier mais impossible”, écrit Jules Roy.
Comment Jules Roy s’est-il laissé aller à ces “effractions” d’une correspondance privée et à s’en vanter, en “collant” Colle d’Epate durant des heures pour essayer de “découvrir” qui était Montherlant, jusqu’à vouloir recopier ces lettres ! Dans quel but  ? Tout cela est méprisable et ressemble aux indiscrétions malveillantes des Sipriot-Peyrefitte des années 1970-1980. Toujours l’obsédante recherche sur la vie sexuelle du génie qu’on ne peut égaler, pour le diminuer, le ridiculiser ou le déshonorer  !
Voir sur ce site les articles consacrés aux amoureuses de Montherlant).

30 novembre 1945  : visite à Montherlant. Surpris dès mon arrivée par sa petite taille et son embonpoint [2]. Je m’étonne de le voir si bienveillant, tenant des discours si généraux et si conventionnels.
“Je sais bien que vous êtes allé à Weimar…” [3]
Il bondit. Cela n’est pas vrai. Il se défend longuement, âprement. Il s’est contenté d’écrire dans les journaux collaborationnistes, [4] mais l’argent qu’il a reçu des Boches, il l’a versé à la Croix-Rouge de Genève. Le Solstice de juin a été interdit un moment, puis la mesure a été rapportée grâce à son traducteur allemand. A la victoire alliée, il n’a pas voulu aller vers le soleil levant.
La pièce où il reçoit : deux fauteuils Louis-Philippe [5], masques, les têtes de Vénus et d’Hermès, de lion et de taureau. Rien à part cela. La pièce est glacée. Les autres sont chauffées. Il l’avoue incidemment pour qu’on sache qu’il ne retient pas les visiteurs que le froid doit chasser. On vient de lui offrir deux cent mille francs pour qu’il publie des fragments de correspondance féminine ; il a refusé. Ses choses les plus précieuses : le manuscrit des Garçons (pendant aux Jeunes Filles) est en Angleterre dans un coffre de la banque Barclays (ce qui d’après lui prouve assez qu’il aimait l’Angleterre). “Les pages des Nuits de mai [6] sont un peu ahurissantes… Quand je les relis, je me demande comment j’ai pu les écrire.”
Il m’a invité à onze heures pour que je n’aie pas l’idée de penser qu’il va me retenir à déjeuner. Sa muflerie. [7]

17 février 1954 : De plus en plus, Pierre Fresnay ressemble à Montherlant à quarante ans, avec son front haut, ses cheveux bruns rejetés en arrière, son regard impérieux et son nez busqué ; mais à un Montherlant qui ne serait ni orgueilleux ni vaniteux et qui aurait toujours souci des autres.

3 septembre 1954, Bruxelles : En voyant Pierre Fresnay si jeune sous ses cheveux coupés en brosse, il me semble toujours rencontrer le Montherlant des Olympiques. Du moins, le Montherlant des images : celui que nous croyions viril et pur, insolent, audacieux, illuminé par le génie, et que j’avais envie de suivre comme l’idéal de ma vie.

5 octobre 1954 : Montherlant, l’autre jour (nous ne nous étions pas vus depuis dix ans) : “Je m’arrange fort bien de ma vie privée. C’est ma vie publique qui me vaut les pires difficultés.” Et encore :” Ce que j’écris dans mes lettres ne veut rien dire et n’a aucun sens. Je dois donner une certaine longueur à une lettre, et j’y mets n’importe quoi. Je ne comprends pas comment on peut croire que les lettres éclairent un écrivain ou son œuvre.” Assez étonnant. Il me dit avec amertume la crainte de toutes les humiliations dont la vieillesse proche va l’accabler, et c’est ce qui m’a paru le plus sincère chez lui.

2. Journal 2 : 1966-1985 ou Les années cavalières 

30 décembre 1969 :

Lettre d’Henry de Montherlant (à Jules Roy qui se porte candidat à l’Académie française) :

Cher monsieur,
J’avais été un peu surpris de recevoir ce livre de vous après la lettre peu amène que vous m’écrivîtes après la fin de la guerre. Je ne l’ai pas lu, mais l’ai conservé, et le lirai sûrement.
Depuis trois ans environ, je ne reçois aucun candidat. D’abord parce que les visites sont déconseillées par le règlement ; ensuite parce que mes confrères Rostand, Gaxotte, Guéhenno, et un autre de qui le nom m’échappe (Gilson  ?) n’en reçoivent pas plus que moi, et m’ont précédé dans cette voie.
Nous nous reverrons peut-être en ce lieu qui, malgré ce qu’évoque une Coupole, est plus proche de la terre que du ciel. Bien à vous.
Montherlant.

Je lui réponds :

Mon cher Maître, il va y avoir bientôt vingt-cinq ans de cela. Ma lettre faisait suite à une visite. Et pas d’Académie  ! Je vous croyais en danger. Je venais vous proposer de témoigner en votre faveur. Vous m’avez reçu plutôt fraîchement alors qu’il n’y avait en moi qu’ardeur et générosité.
Vous étiez mon maître. Vous l’êtes resté. Je ne vois pas ce qu’il y aurait de déshonorant là-dedans. Je vous ai envoyé mon dernier livre parce que je souhaitais vous dire ce que j’éprouvais pour vous. Je ne suis pas immortel, moi. Le temps m’adoucit le cœur. Mais si, un jour, j’ai de nouveau une épée, comme vous, l’acier en sera trempé à Tolède.
Jules Roy.

18 août 1982 : Travaillé à un laborieux article sur Montherlant, je dois avouer qu’en ce qui concerne les femmes, il a été mon maître : il m’a enseigné comment elles étaient, ce qu’elles pensaient, comment il fallait les traiter. Costals [8] et le Montherlant de La Petite Infante de Castille ont été mes modèles, pendant quinze ans de ma vie. Erreur capitale : je n’étais ni homosexuel ni menteur comme lui. [9]

 
 

Jules Roy à la fin de sa vie.

18 septembre 1982 : Explication à mes yeux de la mort de Montherlant. Elle l’a grandi. Au bout d’une vie de mensonge, il a compris que son œuvre devait reposer sur le vrai et résister au temps. Par égoïsme, par volonté de postérité, il s’est montré courageux pour la première fois de sa vie, et s’est tué.

(NDLR : encore une attaque gratuite de Jules Roy.

  • Montherlant poltron  ? Il fut engagé volontaire en 1917, demanda à servir sur le Front et fut blessé de 6 éclats d’obus en juin 1918, (handicap 50%), ce qui lui valut la Croix de guerre et une très belle citation de Pétain (voir sur ce site la biographie de Montherlant au cours de la guerre 14-18).
    Montherlant était aussi un passionné de tauromachie ; il n’a pas hésité à affronter de jeunes taureaux. Fin 1925, il est renversé par un taurillon dans un élevage près d’Albacete en Espagne, où il s’entraîne à toréer. Coup de corne qui taillade la périphérie du poumon. Il crache le sang. On en rit à Paris dans les revues de fin d’année. Son état s’aggrave. Typhoïde et deux congestions pulmonaires. Il va passer quatre mois dans des maisons de santé.
    En mai 40, il suivit les troupes françaises sur le front et fut légèrement blessé par les tirs d’un avion
  • Montherlant menteur  ? Mais quel est l’écrivain qui dit toujours la vérité  ?
    Jules Roy règle ses comptes en reprenant tous les clichés répétés sans cesse par les ennemis de Montherlant tout au cours de la vie de l’écrivain.)


3. Journal 3 : 1986-1996 ou Les années de braise

5 février 1987 :

(NDLR : Jules Roy fut un candidat deux fois malheureux à l’Académie française et ne sera jamais élu).

Hier, visite à Maurice Druon quai Conti. Il y a tout changé, du moins en ce qui concerne l’Académie (…). Plus d’ors, et des hommes remplaçant les hôtesses. Vestiaires. Escaliers somptueux, petit salon avant le bureau du maître. Lui, comme s’il était encore ministre de la Culture. Pas plus. Pas moins (…) A la fin comme je me lève, il me demande si cela m’a fait de la peine les deux fois où… Oui, j’en ai souffert. Cela m’a fait de la peine. Cela a l’air de l’étonner. Maintenant, sous-entendu, c’est trop tard, tu n’es pas Claudel, tu n’es pas Montherlant. Je me le tiens pour dit.


Sources

  • Jules Roy, Journal 1, Les années déchirement 1925-1965, 430 pages, chez Albin Michel 1997
  • Jules Roy, Journal 2, Les années cavalières 1966-1985, 354 pages, chez Albin Michel, 1998
  • Jules Roy, Journal 3, Les années de braise 1986-1996, 397 pages, chez Albin Michel, 1999
  • Jules Roy, Mémoires barbares, 1989, chez Albin Michel, 569 pages,
  • Guy Dugas, Portrait de Jules Roy pour les Célébrations nationales de 2007

Jules Roy a écrit de nombreux essais, récits, poèmes, romans. Son œuvre la plus ambitieuse fut peut-être Les Chevaux du soleil, roman, Grasset, 1980, 6 volumes, et l’édition en un volume chez Omnibus en 1995.

Liste des œuvres de Jules Roy

Il reçut de nombreux prix littéraires :

  • Prix Renaudot en 1946 pour La Vallée heureuse
  • Prix Prince-Pierre-de-Monaco en 1954 pour Le Navigateur
  • Grand Prix littéraire de Monaco en 1957
  • Grand prix de littérature de l'Académie française en 1958
  • Grand Prix national des lettres en 1969
  • Prix de la Ville de Paris en 1975

Notes

[1] Alban de Bricoule, personnage de l’œuvre de Montherlant

[2] Montherlant n’était pas grand mais ne faisait pas petit non plus car il était très baraqué. Torse d’athlète. Embonpoint  ? Ses photos de 1945 contredisent cet avis de Jules Roy toujours prêt à abîmer l’écrivain qu’il avait tant admiré.

[3] Montherlant n’a jamais été à Weimar. C’est une obsession de Jules Roy.

[4] Montherlant a écrit 4 ou 5 articles dans La Gerbe. Ces articles commentaient son œuvre et certains furent publiés dans ses Essais. A la Libération, Montherlant ne fut pas poursuivi. Le "Dossier Montherlant" sera examiné tour à tour par : en septembre 1944, la Direction générale des services spéciaux du 2ème Bureau : non-lieu. En février 1945, la Commission d'épuration de la Société des gens de lettres ne retient aucune charge contre l'écrivain, après l'avoir entendu. Un tribunal d'épuration composé de certains écrivains de la Résistance lui infligérent une peine (une interdiction professionnelle) de six mois, rétroactifs de non-publication. Ils furent deux “juges” sur huit à se déplacer pour entendre Montherlant ! En mai 1945, la Haute Cour classe l'affaire suite à une information contre Montherlant. En été 1945, information contre Montherlant devant la Chambre civique : classement sans suite. Il n'y aura jamais d'instruction.

[5] Le mobilier du salon de Montherlant est Directoire et le fauteuil, dessiné par David, exécuté par J-B Séné, fut un des sièges de la salle des séances de la Convention Nationale. Il fit ensuite partie du mobilier de Napoléon Ier au palais des Tuileries. Il a été exposé à l’Exposition du Meuble, au Musée Carnavalet, en 1937.

[6] Les pages des Nuits de mai parues dans Le Solstice de juin (Pléiade, Essais de Montherlant, page 915) sont parmi les plus belles pages de toute l’œuvre de Montherlant comme, d’ailleurs, tous ses textes relatifs à la période 40-45.

[7] Pourquoi Montherlant aurait-il été obligé d’inviter à déjeuner un homme qu’il devait deviner hostile  ?)

[8] Costals personnage principal des 4 tomes des Jeunes Filles souvent identifié à Montherlant.

[9] Phrases ambigües et rancunières. Il avoue que Montherlant fut son maître à l’égard des femmes et il le caricature en homosexuel et menteur  ! Contradictoire et compliqué Jules Roy  ! De quel droit juge-t-il Montherlant  ? Et la sexualité de Jules Roy  ?