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Articles sur Montherlant (hors presse)

57. Ce que j'ai découvert sur Montherlant en créant son site sur le Net, par Henri de Meeûs

(Conférence donnée à la Sorbonne lors du Colloque Montherlant à Paris le 25 novembre 2010)

Montherlant aimait dire : Le pire est toujours certain.

Quand on lit l’interview de l’écrivain américain Philip Roth accordée au Journal Libération du 30 septembre 2010, à la question s’il est très pessimiste sur l’avenir des livres et de la littérature, Philip Roth répond :

"Je suis pessimiste et je suis sûr d’avoir raison. C’est une question de temps. Les gens sont face à la dictature de l’écran de la télévision, de l’ordinateur, de l’Ipad… Ces écrans sont plus importants que les livres. Même les livres numériques, je ne suis pas sûr de ce qu’il en restera dans dix ans. Les gens ont perdu la faculté de se concentrer sur un livre. Les gens qui lisent vont devenir une secte très réduite. L’écriture va continuer mais le nombre de lecteurs va diminuer. Et à un moment ou à un autre, plus personne ne va lire. Mais bon, l’avantage d’avoir 77 ans, c’est que je ne serai plus là pour le voir."

Si on partage cet avis, tout le travail-papier sur la littérature et sur l’œuvre d’Henry de Montherlant risquera bien, tôt ou tard, d’être anéanti.

Vous comprenez déjà une des raisons de la création du site Montherlant.be sur internet !

Le site www.montherlant.be fut créé en juin 2007 un peu avant l’organisation à Bruxelles de la Journée Montherlant du 25 septembre 2007 où dix conférenciers français et belges et cinq comédiens ont fasciné un très nombreux public avec l’œuvre de Montherlant. Une lecture de textes choisis de l’écrivain s’intercalait entre chaque conférence, et permettait ainsi de réveiller d’éventuels auditeurs assoupis.
Cette Journée parrainée par l’Ambassade de France en Belgique, eut un énorme succès.La grande salle louée à cette occasion ne se désemplit pas de 9h du matin à 18 heures de l’après-midi.
Je ne fus pas le seul à constater l’incroyable émotion que l’œuvre de Montherlant suscitait chez les spectateurs, dont certains, les larmes aux yeux, venaient à la fin de la journée m’exprimer leur reconnaissance.
Ceci pour vous dire combien en même temps que cette Journée consacrée à Montherlant, il me sembla indispensable de créer un site internet consacré à ce génie reconnu comme tel de son vivant, Trésor national français, mais qui à peine mort, suicidé, fut traité de la manière la plus odieuse par ses ennemis et par certains critiques.

Montherlant décidément avait tout prévu. N’écrivait-il pas à la fin de sa vie :

“Aussitôt que je serai mort, deux vautours, la Calomnie et la Haine couvriront mon cadavre pour qu’il leur appartienne bien à eux seuls, et le déchiquetteront.

Mon site eut pour but principal de présenter sur la toile un Montherlant écrivain génial, et donc inséparable de son œuvre admirable mais aujourd’hui trop peu connue, trop peu lue, trop peu étudiée. Jusqu’à sa mort en 1972, chaque année, d’innombrables études, livres et articles lui étaient consacrés. Il suffit de regarder sur le site Montherlant la fenêtre Bibliographie pour constater que de 1920 à aujourd’hui, il y a 2500 références d’auteurs qui traitèrent de Montherlant dans des livres, des revues et des journaux.
Et cette bibliographie est encore inachevée. Il y a des centaines et des centaines de références à insérer encore dans le site Montherlant.

Quand le site fut créé et que je commençai à écrire les articles qui y sont insérés, j’eus la surprise d’être contacté par une très vieille dame, presque centenaire, Madame Elisabeth Zehrfuss, très distinguée, à la mémoire intacte, qui avait été une amie de Montherlant de 1935 à 1972.

Comme elle avait été choquée par les attaques de Peyrefitte et par les deux tomes de la biographie de Sipriot, qu’elle rejetait avec horreur et mépris, elle me contacta pour m’encourager à mener à bien cette Journée Montherlant de septembre 2007 et à poursuivre le travail sur le site. Elle m’invita à plusieurs reprises chez elle à Paris où chaque fois, durant trois heures sans faiblir, elle me racontait ses souvenirs sur Montherlant, qu’elle appelait son exquis Montherlant.
Elle m’autorisa à enregistrer ses récits et me fit cadeau de 1400 pages d’un syllabus où elle avait transcrit des souvenirs sur l’écrivain ainsi que la copie des 400 lettres que Montherlant lui avait adressées, toutes drôles, vives, farceuses, où on retrouve sans aucun doute le " ton " de Montherlant, unique, reconnaissable immédiatement, c’est à dire la “marque” évidente de l’écrivain  ! (Ce ton, cette marque sont curieusement et étrangement absents dans la fameuse correspondance avec Peyrefitte. Les lettres de Montherlant à Peyrefitte furent-elles une FEINTE de Montherlant (fasciné par la feinte dans sa vie), et donc un exercice de style, une fabrication de Montherlant face à un Peyrefitte qui aurait gobé au premier degré ce que lui racontait dans un style qui n’était pas le sien l’immense écrivain, grand amateur de farces et qui aimait brouiller les cartes  ?). La lecture de la correspondance de Montherlant avec Elisabeth Zehrfuss, toujours inédite, montre que Montherlant aimait surprendre, revêtir des identités qui n’étaient pas la sienne, lui jouer des tours au téléphone, etc…

Qu’ai-je donc découvert en construisant le site Montherlant sur Internet ?

1. Sa famille n’a rien d’espagnol.

Les Montherlant, comme la commune de Montherlant (un hameau de 100 maisons) sont du Beauvaisis dans l’Oise. L’origine catalane tant de fois répétée y compris sur le site de l’Académie française me semble être une erreur. Montherlant l’avait laissé croire au début de sa carrière ; Faure-Biguet y avait donné foi. Cela cadrait bien avec le goût de Montherlant pour l’Espagne et les corridas. Mais je crois vraiment que c’est faux.

Les ancêtres de Montherlant sont français, et surtout bretons ou normands. Sur le site, figure la liste des ascendants de Montherlant jusqu’en 1500 répertoriés à partir d’un site de généalogie consacré à des célébrités, lien que j’ai découvert par hasard et qui me semble fiable. Pas de trace d’Espagne ou de Catalogne dans les ancêtres !

Je pense aussi que cette famille Millon de Montherlant doit être considérée comme noble, car elle est caractérisée comme telle dans plusieurs livres sur la noblesse française et dans plusieurs armoriaux.

Lors de sa dernière interview par Jean-José Marchand, le 10 mai 1971, Montherlant met brièvement mais avec netteté les choses au point :

L’origine de ma famille ? Elle était du Beauvaisis et du Gatinais, de petite noblesse mais de noblesse certaine, et la présumée origine catalane, dont j’avoue que j’ai joué pas mal au début de ma carrière parce que ça faisait très bien avec les taureaux, est uniquement une tradition de famille répercutée de voix en voix depuis 150 ans, mais il n’y a aucun document authentique : je crois que c’est une blague…

2. S’il ne fait aucun doute pour moi que Montherlant était un aristocrate, il est plus étonnant d’observer que Montherlant jusqu’en 1940 acceptait que son nom soit précédé du titre de Comte.

Pour preuve, on peut lire sur une plaque de pierre à l’entrée de l’Ossuaire de Douaumont, l’inscription de Comte de Montherlant comme premier secrétaire général de l’Ossuaire de Douaumont. Cette plaque fut apposée en 1932.

Ses père et mère portèrent-ils ce titre de comte et de comtesse ? Je n’en suis pas certain. En effet :

  • a) sur la lettre de faire-part mortuaire du grand-père Frédéric de Montherlant, aucun des Montherlant qui y figurent, y compris Joseph le père d’Henry, ne porte de titre. Ils sont tous Monsieur ou Madame.
  • b) sur le carton de naissance d’Henry daté du 20 avril 1895, les parents d’Henry sont aussi très simplement Monsieur et Madame, mais surprise, discrètement est posée sur le coin supérieur gauche de ce carton une couronne comtale à 9 perles avec la devise Tantum pro liliis (Seulement pour les lys), devise des Millon de Montherlant. Premier essai de grimper dans la hiérarchie de la société aristocratique.
  • c) Et quand Joseph, le père d’Henry meurt à 50 ans, on lit sur le faire-part qu’on enterre un Joseph titré comte de Montherlant. Il faut dire qu’annoncent sur ce faire-part mortuaire toute une série de personnages titrés dont le beau-frère du défunt, le comte Henry de Riancey (le “modèle” du Coantré des Célibataires), les oncles de sa femme soit les barons de Courcy y compris le baron Pierre (Pietro) de Courcy (le “modèle” d’Elie de Coëtquidan des Célibataires). Sachez aussi que la sœur de Joseph, Cécile de Montherlant, femme de lettres et donc tante d’Henry, avait épousé un Beguin Billecocq diplomate dont le père avait été créé Comte romain (un titre concédé par le Pape Pie IX).

Qui prit la décision d’officialiser un titre de Comte pour Joseph de Montherlant, petit fonctionnaire des Finances, titre comtal qu’il n’a peut-être jamais porté de son vivant ? Est-ce son épouse Marguerite qui voulut cela ? Mais malade, et bientôt morte, elle n’assiste pas à la messe de funérailles de son mari. S’intéressait-elle d’ailleurs encore à ces détails ? Ne serait-ce pas plutôt le fils Henry, lui-même âgé de 19 ans, qui à l’époque, assez snob (on l’appelait Le Marquis à Sainte-Croix), n’accepta pas que son père soit enterré sans titre de noblesse ? C’est une hypothèse.
Toujours est-il que dans le cimetière du village de Montherlant, sur la pierre tombale du père d’Henry, sera gravé pour l’éternité le titre de comte de Montherlant titre auquel cette famille n’avait pas droit, même si les Montherlant sont nobles sans aucun doute, malgré toutes les méchancetés qu’on a pu écrire à ce sujet.
Gide avait été agacé que Montherlant au début de sa carrière dans les Lettres fasse sonner un peu trop ses origines aristocratiques.
Mais à la fin de sa vie, Montherlant écrivait à Philippe de Saint Robert que “ses ancêtres et lui s’étaient affublés assez misérablement du titre de comte auxquels ils n’avaient pas droit”.

3. Autre découverte : Marc de Montjou et Philippe Giquel les deux camarades de Sainte- Croix de Neuily.

A. Parlons d’abord de Marc de Montjou

a) Au sujet de Marc de Montjou, ami de Montherlant à l’Ecole Sainte-Croix de Neuilly, j’ai eu la chance de découvrir un travail généalogique très poussé sur l’histoire de la famille Montjou, noble depuis 1773 du fait de la charge d’un ancêtre Montjou qui fut maire de Poitiers.

Dans cette étude détaillée du généalogiste Geoffroy Guerry cousin des Montjou, on trouve beaucoup d’informations, par exemple :

  • le grand-père de Marc de Montjou, le comte Emile de Montjou, bel homme distingué avec calèche, chevaux, chapeau haut de forme et château, reçut pour différents services rendus à l’Eglise, un titre comtal du pape Léon XIII en 1884, titre transmissible par primogéniture masculine. Ce grand-père de Marc fut d’abord très fortuné (château, immeubles et terres) puis à la fin de sa vie, victime d’un escroc, il dut réduire fortement son train de vie et vendre une grande partie de ses immeubles pour rembourser les créanciers.
  • le père de Marc de Montjou, le lieutenant-colonel comte René de Montjou, né en 1857, avait 40 ans de plus que son fils Marc né en 1896.

En août 1914, le colonel René de Montjou alors à la retraite est rappelé par l’armée à 57 ans. Il est nommé président de la commission d’achats des chevaux destinés à la Cavalerie française, et est envoyé aux Etats-Unis pour acheter sur place des centaines de chevaux afin de remplacer les montures tuées en France dans les combats.

Quand René de Montjou négocie aux Etats-Unis, son fils Marc, l’ami de Montherlant, est tué en octobre 1915 sur le Front des Flandres où il s’est porté volontaire.

Son père, le Colonel, doit rentrer dare-dare des Etats-Unis pour s’occuper de la sépulture de son fils.

b) Mais qui était Marc de Montjou ?

Marc Gaborit de Montjou, l’ami de Montherlant, est né en février 1896, et Henry de Montherlant en avril 1895. Ils suivent les mêmes cours, ont les mêmes professeurs dans ce Collège. On est en 1911.
Ils sont les seuls aristocrates de cette dernière année, en classe de philosophie.
Marc est très intelligent et fort doué pour les mathématiques et les sciences abstraites. Au début, leurs relations seront caractérisées par un mélange d’attirance et de méfiance.
Marc impressionne Henry.
Marc a un caractère dominant, complexe, secret, pudique, et peut-être un peu trouble.
Quand la guerre 14-18 éclate, Marc fait preuve d’un grand courage. Il n’était pas obligé de monter si vite sur le Front. Mais il n’hésite pas et se porte volontaire pour monter en ligne, alors qu’il était planqué dans un dépôt d’Artillerie. A peine arrivé sur le champ de bataille comme Aspirant volontaire, il se fera tuer le 7 octobre 1915 en Belgique. Une balle le frappe en pleine tête à 19 ans.

Notons que les deux amis sont morts chacun une arme à la main puisque le 21 septembre 1972, Montherlant périra frappé par une balle de son revolver.
On pense à ce texte d’Arthur Schopenhauer : La vie de l’individu est une lutte perpétuelle avec les autres. Partout, il trouve un opposant, vit en conflit permanent et meurt les armes à la main ". (A.S, Supplément à la souffrance du monde).

La mort de Montjou suscitera une émotion profonde chez Montherlant. Ce choc sera exprimé par trois textes qu’on peut lire dans La Relève du matin, le premier livre de Montherlant.
Dans ces trois textes le souvenir de Marc de Montjou est évoqué avec émotion, respect et aussi une grande attention pour essayer de le comprendre car Montjou était une personnalité qui avait gardé pour Montherlant une partie de son mystère :

  • 1er texte : En mémoire d’un mort de 19 ans de qui je joins les mains sur ce livre
  • 2ème texte : Pâques de guerre au collège
  • et enfin 3ème texte : L’allocution d’Henry de Montherlant datée du 21 janvier 1920 à l’Ecole Sainte Croix, lors de la 1ère réunion d’Anciens, fort solennelle donc, avec les survivants des élèves et du corps professoral c’est à dire, notamment :
    • pour les supérieurs : l’abbé Barbier de la Serre, futur Mgr de la Serre, futur Vice-Recteur de l’Institut Catholique adjoint du Cardinal Alfred Baudrillart.
      L’abbé de la Serre fut peut-être un modèle de l’abbé de Pradts. Mgr de La Serre est mort à l’âge de 89 ans, trois ans avant celui qu’il avait fait renvoyer de Sainte-Croix et qui ne le lui pardonna jamais.
    • l’abbé Petit de Julleville, futur Mgr Petit de Julleville, futur archevêque de Rouen, futur Cardinal nommé par Pie XII, et qui fut peut-être le modèle du supérieur Pradeau de La Halle, dans la pièce La Ville
    • et les anciens élèves du collège engagés volontaires et qui avaient échappé à la mort.

Il faut se rappeler que, parmi les condisciples de son année en philosophie portés volontaires pour le front, Henry de Montherlant fut le seul survivant de sa classe.
Peut-être est-ce pour Montjou que Montherlant écrivit aussi le beau poème A un Aspirant tué ?
Sans doute est-ce la mort de Montjou qui poussera Montherlant à demander son transfert en première ligne en juin 1918 ? On connaît la suite : il est très vite blessé de 7 éclats d’obus, ce qui lui vaudra la Croix de Guerre.
Quand un demi-siècle plus tard Montherlant publiera en 1969 son roman Les Garçons, on peut se poser la question : Les condisciples connus à Sainte-Croix servirent-ils de modèles à Montherlant ?
Dans quelle mesure ? Montherlant a toujours réclamé le droit à l’invention, et à la liberté de son imagination ? Alors ? Marc de Montjou a- t-il inspiré le personnage de Paul de Linsbourg des Garçons ?

Par beaucoup de détails extérieurs, Linsbourg n’est pas Montjou.

Exemples :

  • dans le roman, Paul de Linsbourg est enfant unique. Dans la réalité, Marc de Montjou a deux frères et une sœur ;
  • dans le roman, le père de Linsbourg est très riche, est administrateur du collège, etc… Dans la réalité, le père de Montjou, officier, a peu de fortune

Donc sur certains points Montjou n’est pas le Linsbourg du roman.

Mais cependant par d’autres détails plus psychologiques, Montherlant semble indiquer que Montjou lui a fourni quelques matériaux pour construire le personnage assez sombre de Paul de Linsbourg.

Exemple : voici comment Montherlant décrit Paul de Linsbourg :

"Avec son visage quelconque et presque fade, mais lui aussi ses yeux de braise, qui criaient ses secrets, lesquels n’en étaient pas - le génie de la culpabilité transfigurait ce médiocre visage.”

- Linsbourg était comme une gare régulatrice pleine d’horaires et d’aiguillages, envoyant tel protégé à tel grand, tel autre à tel autre (…) Nourri dans le sérail, doué d’une mémoire infernale, d’un recours infaillible, d’une présence d’esprit qui tenait de l’éclair, d’une audace ahurissante, ses huit ans d’internat étaient comme une carte d’état-major sous ses yeux."

Plus loin, je lis : ”Il était fort élève, le seul de sa classe à préparer ensemble - en vue de Saint-Cyr - le bachot lettres et le bachot math. élém."

Or Marc de Montjou était lui aussi un très brillant élève, très fort en math, il préparait les 2 bachots, le littéraire et le bachot math.
La fadeur du visage de Marc de Montjou tel qu’il apparaît sur les photos connues, sa brillante intelligence qui impressionnait Montherlant, ses capacités quasi militaires d’organisateur et de "protecteur" peuvent faire penser sans trop d’erreur qu’une partie de sa personnalité inspira Montherlant pour construire le personnage trouble et complexe de Linsbourg dans Les Garçons.

Montherlant aurait-il après 50 ans vu en Montjou un personnage plus sombre et donc différent de celui du jeune héros évoqué dans La Relève ? C’est fort probable.
Je m’arrête là car il serait malhonnête et certainement contraire à la volonté de Montherlant d’identifier Montjou à 100% à Linsbourg. Et comme on le dit : Laissons les morts en paix !

B. Parlons maintenant de Philippe Giquel, le Prince de La Ville

J’exprime à nouveau les mêmes réserves quant à une identification complète de Serge Souplier héros central de l’œuvre de Montherlant dans La Ville et Les Garçons avec Philippe Giquel qui a vraiment existé et qui fut aussi élève à Sainte-Croix.

De récentes recherches ont abouti à une étude très complète du sujet par Monsieur Christian Lançon dans un excellent article qu’il a accepté d’insérer en octobre 2010 sur le site Montherlant.

Son étude passionnante met en lumière la personnalité de celui que Montherlant avait aimé.

Philippe Giquel était plus jeune de deux années que Montherlant. Il n’avait pas froid aux yeux car en 1918 il s’engagera dans l’aviation pour combattre les Allemands. Après la guerre, il poursuivra une carrière de pilote aviateur civil avec meetings et démonstrations de voltiges aériennes.

En même temps, il sera l’auteur de nombreux articles sur l’Aviation et notamment dans Le Petit Journal.

C’est grâce à son amie Elisabeth Zehrfuss que Montherlant dans les années trente put retrouver la trace de Philippe Giquel qui était marié et en instance de divorce. Alors qu’on pensait, y compris Elisabeth Zehrfuss, que les deux amis après leurs retrouvailles ne s’étaient plus revus, on apprend avec étonnement que Montherlant continua à voir Philippe Giquel.

Il accepta même au début des années 60 d’être le parrain d’un enfant de Giquel, celui-ci s’étant remarié. Parrain d’une fille qui s’appellera Christine.

4. Autre découverte : l’amitié de Montherlant et de Pierre de Massot

Montherlant a glissé dans son œuvre le nom de Pierre de Massot à plusieurs reprises, mais de façon discrète, en bas de page, et deux fois à ma connaissance en pleine page.

Il fut plus généreux à cet égard que Gide qui ne citera jamais Pierre de Massot alors qu’existe entre Gide et Massot une importante correspondance publiée en 2001 dans un ouvrage de 250 pages par le Centre des Etudes gidiennes.

Le comte Pierre de Massot est un aristocrate né en 1900 dans une famille ruinée. Trois de ses frères furent tués au cours de la Première Guerre mondiale. Il a fait de très bonnes études, mais si la littérature le passionne, il va quitter trop jeune sa province et rencontrer pour son malheur à Paris des amis du groupe de Jean Cocteau qui vont l’initier à de multiples drogues dont il ne pourra plus se défaire. Il rencontrera aussi les Surréalistes parmi lesquels Picabia, André Breton et Marcel Duchamp.

Ce jeune homme très intelligent aura toujours les plus grandes difficultés à trouver un travail qui puisse assurer sa subsistance. Pour lui permettre de survivre, des amis comme André Gide vont l’aider.

De même, Montherlant n’a pu rester insensible à la destinée de Massot puis qu’il lui écrit : “L’impécuniosité et la maladie s’abattant sur le même être savent avoir raison des plus durs courages ; je ne doute pas qu’elles aient eu raison du mien.”

Par Massot, Montherlant devait être bien informé sur le milieu des dadaïste et des surréalistes pour lesquels il n’eut jamais d’atomes crochus.

Massot écrit de courts textes, et des poèmes. Il sera publié avec l’aide de ses amis surréalistes chez des éditeurs confidentiels qui imprimeront des recueils ou des plaquettes, mais cela ne permettra pas à Massot d’en vivre. Il devra accepter des emplois médiocres et fatigants d’autant plus nécessaires qu’il va se marier.

En effet, Pierre de Massot épouse en 1929, sur les conseils de Jacques Maritain, une ravissante écossaise, Miss Robbie Robertson, de qui il aura un fils. Malheureusement cette jeune femme à qui il est tendrement attaché mourra en 1951 d’une terrible maladie. Cette mort plongera Pierre de Massot dans une profonde dépression, mais lui fera écrire de très beaux poèmes.

La correspondance Montherlant-Massot n’ayant pas, à ma connaissance été publiée, je n’ai pu que chercher et mettre en lumière la personnalité de Pierre de Massot, être distingué mais blessé intérieurement, passionné de littérature,, ami de Marcel Duchamp, peint par Picasso, mais aussi grand dépressif, dépendant de drogues et d’alcool, jamais remis de la mort de son épouse, défenseur de Montherlant quand celui-ci est attaqué, car Massot publiera des textes pour montrer que Montherlant est un des plus grands écrivains français.

En 1936, Massot écrit dans Vendredi (1er mai 1936) sous le titre “Remarque sur Henry de Montherlant” :

“Montherlant est le plus grand de sa génération, et peut-être l’un des plus grands écrivains de notre temps

Massot a toujours considéré Montherlant comme l’exemple de l’écrivain qui avait réussi à sauvegarder une totale liberté.

Politiquement, Massot sera longtemps fidèle aux communistes, puis après 1956 (Hongrie) quittera le parti et deviendra trotskiste, ce qui montre au moins que Montherlant avait des amis situés partout sur l’éventail politique.

Massot mourra en 1969 deux années avant le suicide de Montherlant 

 
 

Henry de Montherlant.

5. Autre découverte sur deux amoureuses de Montherlant

Gallimard dans son catalogue sur les Pléiades aime répéter que Montherlant est un ennemi des femmes. Cette affirmation fait partie des clichés faciles sans cesse relancés sur Montherlant.

On constate d’abord que cet immense écrivain fut aimé avec passion des années durant par une quantité de femmes toutes plus amoureuses les unes que les autres, chacune à leur manière soit discrète et intelligente, soit passionnée, soit possessive et obsédée, soit même harceleuse et insupportable.

Montherlant avait besoin de solitude, aussi essentielle que l’oxygène pour créer son œuvre.

Pas question d’un mariage, pas question d’enfants légitimes.

Mais le cliché “ennemi des femmes”, c’est vraiment du n’importe quoi. On sait que Montherlant céda à la tentation de fiançailles, vite rompues. On sait que des Lettres à une certaine Francine Legendre furent confiées à un Notaire à charge de les publier après la mort de l’écrivain, et que cette publication n’a pas encore vu le jour.

Peu importe, mais l’immense correspondance de Montherlant n’est pas encore étudiée, car on n’en connait que des morceaux éparpillés un peu partout qui apparaissent au fur et à mesure que les années passent.

Ce que j’ai découvert, c’est que Montherlant a montré une extraordinaire patience dans ses relations avec ces femmes qui l’adoraient. S’il avait été vraiment un misogyne, ou un ennemi des femmes, il aurait rompu très vite, rejetant tout dialogue et refusant de répondre à leurs lettres.

Au contraire qu’observe-t-on ?

A. Prenons l’exemple de Jeanne Sandelion, née en 1899 et morte en 1976

Ses relations avec Montherlant durèrent au moins 35 années de 1928 à 1963 : rencontres, sorties au théâtre, repas au restaurant, lettres nombreuses de Jeanne et réponses brèves de Montherlant qui avait pitié d’elle.

Il y eut, le 13 mai 2007, une importante vente publique de la bibliothèque de Jeanne Sandelion, soit un grand nombre de ses livres, papiers, et multiples correspondances (4000 lettres et cartes postales) avec diverses personnes connues ou non, et parmi les documents les plus importants, son immense Journal intime écrit durant cinquante ans.
Ce Journal est composé de 130 cahiers et fut préempté par la Bibliothèque nationale.

Il serait peut-être temps de déchiffrer le Journal de Sandelion et de l’imprimer pour connaître mieux la relation poursuivie durant tant d’années (vraisemblablement jusqu’en 1963), entre Sandelion et l’auteur des Jeunes filles.
Jeanne Sandelion possédait aussi 300 à 400 lettres que Montherlant lui avait écrites.

Elle désirait qu’à sa mort son Journal soit légué à Montherlant, mais l’écrivain décéda quatre années avant elle.

De l’énorme Journal de Sandelion, j’extrais ce court passage daté de juin 1929, qui concerne Montherlant :

Je vis avec vous et cela sans effort, par une émanation naturelle de ma pensée vers la vôtre, m’intéressant passionnément à tout ce que vous faîtes. Emanation naturelle, et constante et irrésistible. Je rapporte tout à vous, sans cesse. Je ne peux pas faire autrement. C’est bien plus que de l’amitié, et que de l’amour, c’est une fraternité. Vous vous étonnez de mes divinations, de mes intuitions quant à vos goûts (mais c’est à un point !) Je sais lesquelles de vos amies vous plaisaient tout à fait, celles qui vous plaisaient pendant dix minutes - et vous agaceraient ensuite, celles qui vous crisperaient tout de suite… etc.
Je suis
votre jumelle spirituelle, en quelque sorte, à tel point qu’un jour cette formule s’est installée en moi, bien amusante, que vous aimez.
Je vous aime bien Montherlant, vous savez. Et si le bonheur se donnait, lui aussi, comme un diamant, et si je le possédais, il aurait vite passé de ma main dans la vôtre.

Et voici quelques réponses de Montherlant à l’amour que lui porte Sandelion :

D’abord une mise en garde encore compatissante le 13 novembre 1928 :

“Ne laissez pas ces sentiments (d’amitié amoureuse, ndlr) gagner à la main. En passant de ce qu’ils sont à ce que vous vous défendez qu’ils soient, ils pourraient se corrompre. (…) De votre côté, vous sentez mon estime, ma sympathie et ma curiosité de vous. Je crois vous comprendre assez - votre solitude et vos difficultés - en partie parce que, si extraordinaire que cela paraisse au premier abord, et avec toutes les différences évidentes, j’ai un peu passé par tout cela et je suis le moins invulnérable des hommes. Bardé et insensible d’un côté, de l’autre tout me blesse.”

Lettre de février ou mars 1929 :

Continuez à m’écrire tout ce qui sort de vous. Je garde tout cela précieusement, au besoin je m’y réfère (je vous enverrai un article de moi qui cite votre phrase : “Toute femme est toujours un peu une ratée”)”. On sent ici que Montherlant réunit ses matériaux pour ses Jeunes filles.

Lettre du 8 avril 1929 : Montherlant lui annonce une bonne nouvelle : grâce à son intervention, le roman de Sandelion A l’âge où l’on croit aux îles sera publié. Il lui écrit :

“(…) A vous la gloire ! A vous les renards argentés ! Sérieusement c’est maintenant que vous allez commencer à être empoisonnée. Comment percer, dans cet affreux struggle for life qu’est Paris ? Que vous allez en voir de dures et d’amères ! Quelle horreur ! Enfin, vous l’avez voulu.

On pouvait penser qu’après la parution des Jeunes filles, la relation de Jeanne Sandelion avec Montherlant s’était arrêtée. Non, elle se poursuivra. Il ne rompt pas avec elle. Il essaie de refroidir le brasier. Ce sera toute l’histoire des réponses de Montherlant aux lettres de Sandelion. Il ne veut pas qu’elle désespère totalement, mais il ne veut pas non plus être victime de cet “Hamour” qui risque d’étouffer sa liberté et sa création !

Montherlant n’a pas rompu avec Sandelion car il a eu pitié de cette femme malade d’amour à qui l’écrivain fera encore de temps en temps et durant 35 ans, le cadeau d’une réponse, d’une conversation, ou d’une rencontre à Paris, jusqu’au moment où l’amoureuse épuisée, à bout, après tant d’années de désirs jamais satisfaits, s’écroule.

Jeanne a voulu vivre un rêve, qui deviendra le cauchemar du désir inassouvi. Elle reconnaîtra d’ailleurs, plus tard, avec franchise, que l’échec de leur relation était de son unique faute à elle : Elle écrit ceci : La première impression reçue de Montherlant, et je l’ai toujours gardée, même à travers les malentendus et les différends, qui nous séparèrent longtemps - où je dois avouer que j’eus les plus grands torts, - c’est qu’il est fraternel.

Si on prétend que Sandelion servit de modèle au personnage d’Andrée Hacquebaut, on peut dire que d’autres femmes servirent aussi de modèles.

B. Alice Poirier

Elle est docteur en philosophie, spécialiste de Chateaubriand, de dix années plus jeune que Montherlant, et en contact avec l’écrivain de 1927 à 1950. Elle est obsédée par Montherlant depuis sa première rencontre avec lui : voici un extrait du récit de cette première rencontre dont elle ne guérira pas, qu’elle relate dans son Récit de Grete (qui n’est pas intitulé roman), où le personnage de Grete est Alice Poirier et où Montherlant est caché derrière le nom de Cabrol.)

Le livre paraît chez Grasset en 1955 cinq années après leur rupture.

Il fut charmant. Impossible de feindre une telle gentillesse. D’ailleurs, pourquoi feindrait-il ? Il me parlait, il avait l’air d’y prendre plaisir. Et moi, si parfaitement seule avec lui et en même temps si parfaitement en sécurité. C’était inattendu. Inattendu et ravissant. (…) Tout se passait comme en dehors de moi. Félicité informe, délicieuse, presque sans pensée, presque sans sentiment, (…) Il me parla ensuite de mon emballement pour lui qu’il appelle d’un mot gentil, mon "hippogriffe”. Nous fûmes bien d’accord que jamais Cabrol (Montherlant) n’arriverait à tuer l’Hippogriffe… Comme tous les dieux, l’Hippogriffe peut mourir mais c’est pour ressusciter aussitôt après. (…) Enfin Cabrol (Montherlant) eut ce mot stupéfiant : “Mademoiselle, si vous aviez un époux, seriez-vous heureuse ?(…) Je ne sors pas de l’extase ; mais ça alors, c’est le feu d’artifice, écrit Grete (Alice).”

Cette question “innocente” de Cabrol (Montherlant) va faire partir la fusée d’Alice vers le 7ème ciel. Elle ne reviendra plus jamais sur terre !

Alice échafaude dès lors la possibilité d’un mariage avec Montherlant, car c’est le mariage qui l’obsède  !

Elle écrit :

“Je me marierai en juin. Tenue discrète pour les invités et pour moi. Pour Cabrol (Montherlant), une longue robe de druide en soie blanche. Nous aurons deux voitures. Trainées, c’est une idée à moi, par des vaches. Dans l’une, je prendrai place avec Cabrol (Montherlant) et nos invités. Dans l’autre, il y aura des musiciens et quatre torches. La cérémonie - je ne l’imagine pas chrétienne - aura lieu dans la forêt. J’envisage tout cela hors du temps, somptueux et étrange (…) Quelle sera ma vie demain avec Cabrol (Montherlant) ? Il est d’abord décidé qu’il aura trois mois de vacances conjugales par an, trois mois pendant lesquels il sera libre de faire ce que bon lui semblera, de me laisser sans nouvelles, sans adresse. Et puis, il est aussi entendu que nous ne coucherons pas dans la même chambre.
La promiscuité du vase de nuit avec un si grand poète, quelle chose horrible ! Une pièce de l’appartement sera donc réservée tout exprès à l’amour. Il y aura un lit de feuilles mortes, du musc, des roses, et dissimulés derrière une tenture, trois musiciens en chômage. Et Cabrol (Montherlant) prendra un bain avant.”

Cette fois, Alice Poirier est en plein non-sens, à mon avis intentionnellement. Car le récit fut écrit après la rupture en mars 1950 définitive de Montherlant et publié en 1955. Mais Alice Poirier comme un avion privé de son moteur en panne, va néanmoins continuer jusqu’en 1963 (dixit Sipriot) à entretenir la flamme de son amour impossible. Elle a donc décidé de mettre par écrit dans son Récit de Grete toutes les idées folles, toutes les possibilités et phantasmes, envisageables en théorie avec Montherlant.

Ce n’est que 23 ans après la première lettre d’Alice Poirier que Montherlant harcelé par celle qui voulait absolument l’épouser, arrêtera les frais par cette courte lettre, celle de la rupture, datée du 2 mars 1950 :

“Dans une lettre du 19 janvier 50, je vous avais averti que je romprais avec vous définitivement toutes relations, si vous me faisiez encore une allusion, fût-ce la plus lointaine, à vos imbécillités nuptiales. Vous n’avez pu vous y tenir, et dans votre lettre du 28 janvier, vous recommencez. A partir d’aujourd’hui, vous n’aurez plus jamais signe de vie de moi. Adieu. Montherlant

Après cette rupture définitive, Alice Poirier continuera malgré tout à lui adresser jusqu’en 1963 des lettres qui restèrent sans réponse, dont celle-ci en 1952 :

J’ai cru que vous m’aimiez, mais croire, ce qui s’appelle croire, d’une façon absolue, parfaite, totale. D’une Foi que jamais aucune raison ne parviendrait à détruire.(…) Ne m’épousez pas, Rilet, si ça vous embête. Mais ne détruisez pas cette Foi. Je veux mourir à l’intérieur de cette Foi. Je n’aurais eu que ça dans ma vie.”
(Alice Poirier, lettre à Montherlant du 23 juin 1952)

Un ennemi des femmes aurait-il supporté pendant un quart de siècle ce harcèlement continuel d’une Alice Poirier ?

Pour achever de démolir le cliché du Montherlant ennemi des femmes repris par la Pléiade, j’avance une autre dame :

C. Madame Elisabeth Zehrfuss (1907-2008)

Je vous ai parlé tantôt de ma rencontre en 2007 avec cette charmante vieille dame presque centenaire qui avait très bien connu Montherlant entre 1934 et 1972.

C’était pour moi une chance unique, un véritable cadeau du Ciel, qu’une grande amie de Montherlant s’adressât à moi pour m’encourager dans mon projet d’organiser à Bruxelles une Journée Montherlant, dont elle suivra attentivement la progression depuis Paris. Le succès de cette Journée lui causera une immense joie.

J’eus la chance de la rencontrer à plusieurs reprises à son domicile situé près de la Sorbonne.
Ce fut une passionnante rencontre, que je n’oublierai jamais.

Il s’agit ici, entre elle et Montherlant, d’une amitié amoureuse très différente de la "passion" vécue par les deux autres amoureuses Sandelion et Poirier. Elisabeth Zehrfuss avait compris, en effet, qu’il ne fallait pas coller Montherlant. Résultat : ils se virent beaucoup : restaurants, salons de thé, concerts, théâtres, promenades dans Paris, longues conversations téléphoniques quasi quotidiennes, et échange de billets nombreux. Voici un très court extrait de ces 1400 pages qui montrent bien l’affection totale, dévouée, qui n’a jamais faibli d’Elisabeth Zehrfuss pour son cher Montherlant :

Je mesurais avec ravissement la toujours égale humeur de Montherlant, son amitié souriante, taquine, toujours indulgente et complice. Nos rencontres presque quotidiennes empreintes de gaieté et de connivence étaient une grâce du ciel. Il m’apprenait beaucoup de la vie, avec toujours tant de délicatesse, de retenue et une telle désinvolture que tout était léger. Avec lui, jamais rien de trouble ou de malsain dans ses propos, une hauteur naturelle, et pour les choses de l’existence, un rire et des gambades (…) De toute ma vie, je n’ai jamais rencontré avec personne la même miraculeuse entente.”

Je termine avec l’évocation d’une dame dont on parle trop peu, Madame Marguerite Lauze, mère de Monsieur Jean-Claude Barat, qui a accompagné Montherlant plus de 30 ans, qui est décédée trois mois après l’illustre écrivain. Il existe plusieurs photos qui furent publiées, dont une excellente de Madame Lauze avec un Montherlant très joyeux, heureux et souriant, lors d’une corrida à Toulouse.

Madame Marguerite Lauze était une femme de lettres qui a écrit plusieurs articles sur l’œuvre de Montherlant qu’elle admirait.

Montherlant “le soi-disant ennemi des femmes” a désigné Marguerite Lauze comme son héritière avec son fils Jean-Claude Barat. On connait les derniers mots tracés par Montherlant : Ta mère et toi sont mes héritiers uniques.”

J’arrête ici.

Puissent les jeunes générations mieux connaître Montherlant l’immense écrivain, le poète tragique, qui fut caricaturé et haï par ses ennemis. Son œuvre au style unique, aux images admirables, reste jeune, pleine de vitalité et de lucidité, jamais ennuyeuse à relire, souvent drôle, fascinée par la beauté du monde et par l’horreur de la mort.